La Campagne mondiale pour l’éducation (CME) a retenu pour thème d’action en 2014 l’éducation inclusive et les liens entre l’éducation et handicap. Pouvez-vous nous en expliquer le sens et les enjeux pour le mouvement de la CME ?
Ce choix est le reflet du sentiment partagé par notre mouvement que nous ne pouvons pas obtenir le droit à l’éducation pour tous sans mettre un accent sur les enfants les plus marginalisés. L’un des principes fondateurs de la CME est que tous les enfants ont le droit à une éducation de qualité. Si des membres de la CME ont pu constater des progrès visibles de l’universalisation de l’éducation au cours de ces 10 à 15 dernières années – en particulier une forte progression vers l’éducation primaire universelle – certains enfants, et en particulier les enfants en situation de handicap, restent systématiquement laissés pour compte : soit ils n’iront jamais à l’école, soit ils la quitteront prématurément, soit ils recevront une éducation de mauvaise qualité. L’éducation inclusive est pour nous une réponse à cette exclusion massive des enfants en situation de handicap de l’enseignement de qualité. Respecter, protéger et réaliser les droits des individus, et le droit à l’éducation pour Tous doit rimer avec égalité et non-discrimination. Un système d’éducation véritablement inclusif serait celui qui non seulement ne laisse personne à l’écart, mais aussi incarne ces principes des droits de l’Homme.
Comment définir l’éducation inclusive ?
C’est la possibilité pour tous les enfants de s’instruire ensemble dans des classes « normales » de leur localité ou leur communauté, quels que soient leurs capacités ou leurs handicaps, à l’aide de méthodes d’enseignement, de matériels pédagogiques et d’un environnement éducatif qui répondent aux besoins de toutes les filles et les garçons. Mais l’éducation inclusive favorise aussi des changements dans l’ensemble du système d’éducation et dans les communautés afin de s’assurer que le système d’éducation s’adapte à l’enfant, plutôt que d’attendre de l’enfant qu’il s’adapte au système. De toute évidence, cela est particulièrement important pour les enfants handicapés, souvent perçus comme « un problème » du fait de leur handicap, mais aussi pour tous les autres apprenants marginalisés, tels que ceux issus de milieux culturels minoritaires. Bien sûr, cela prendra du temps, il faudra que les écoles spécialisées et les écoles inclusives coopèrent, que les gouvernements favorisent l’inclusion et que l’expertise des enseignants spécialisés soit partagée.
Quelles sont les priorités pour réaliser l’éducation pour tous et d’encourager l’intégration de tous les élèves dans le contexte de l’après 2015 ?
Nous voulons nous assurer que les cadres de développement « post 2015 » prennent ces questions beaucoup plus au sérieux. Il s’agira notamment de veiller à ce que les progrès vers les objectifs soient suivis non pas uniquement pour les apprenants pris « comme un tout», mais aussi pour les élèves handicapés, les filles et les femmes, les communautés les plus pauvres et d’autres groupes marginalisés. Avec suffisamment de volonté politique et de veille citoyenne, nous pouvons offrir à tous le droit à l’éducation : notre attention actuelle et à venir sur le handicap et l’éducation inclusive est une façon d’accomplir une partie du chemin vers cette réussite.