L’éducation est un droit fondamental inscrit dans la Déclaration universelle des droits de l’Homme et la Convention relative aux droits de l’enfant, deux textes qui réaffirment le principe de non-discrimination.
De surcroît, l’éducation favorise l’égalité de genre, la santé inclusive, la construction de sociétés pacifiques, l’adaptation aux dérèglements climatiques et la protection des enfants.
Or on ne peut conditionner un droit fondamental et inaliénable ainsi que l’aide requise pour garantir son respect à des enjeux géopolitiques et stratégiques.
Conditionner l’aide à l’éducation, c’est conditionner le présent et le futur de milliers d’enfants, d’apprenant.e.s de tous âges, de jeunes ; c’est être en contradiction avec les Objectifs de Développement Durable (ODD) – notamment l’ODD 4 qui réaffirme l’engagement des États à atteindre l’éducation pour tou.te.s -, tout autant qu’avec les engagements de la France.
En l’occurrence, la France s’est engagée par la Loi de programmation relative au développement solidaire et à la lutte contre les inégalités mondiales à « concentrer ses efforts sur les pays les moins avancés (PMA), et particulièrement sur l’Afrique subsaharienne et le Sahel, tout en faisant de l’éducation en situation de crise une priorité ».
Le Conseil présidentiel de développement et les conclusions du CICID énoncent, quant à eux, la priorité donnée à l’éducation en faisant un des 10 objectifs prioritaires de la politique de solidarité : « Investir dans la jeunesse en soutenant l’éducation et la formation des professeurs dans les pays en développement ».
Les populations du Sahel central – dont 50% ont moins de 15 ans – comptent pourtant parmi les plus affectées par le changement climatique et par de violents conflits dans le cadre d’une crise chronique et multidimensionnelle.
Ce sont 2,5 millions de personnes déplacées internes (dont 2,1 au Burkina Faso), près de 7, 5 millions en insécurité alimentaire, une agriculture sinistrée par les sécheresses et les inondations, des systèmes de santé affaiblis.
10 millions d’enfants ont besoin de toute urgence d’aide humanitaire, soit deux fois plus qu’en 2020, tandis que plus de 8 300 écoles ont déjà fermé en raison des groupes armés et des déplacements de populations.
Maintenir et renforcer l’éducation de qualité est essentiel pour garantir aux populations et en particulier les plus jeunes, l’accès aux fournitures et au matériel, pour équiper les écoles, fournir un un soutien psycho-social, un cadre pour la construction de projets individuels et collectifs, ainsi que les connaissances et les compétences pour conserver un espoir en l’avenir et sortir de l’extrême pauvreté.
Les écoles et autres espaces d’apprentissage sont le creuset de sociétés pacifiées, tolérantes et respectueuses des libertés de chacun.
Ils constituent pour les garçons et notamment pour les filles des lieux sûrs contre les violences, les mariages précoces ou forcés, le recrutement dans des groupes armés, la traite d’être humains, la délinquance ou le crime organisé.
Les écoles sont également le point d’accès à d’autres services essentiels tels que la nutrition, l’eau, l’assainissement et les services de la santé. Cela est particulièrement important pour les enfants et les jeunes les plus vulnérables, y compris les filles, les personnes en situation de handicap et déplacées.
L’aide humanitaire est un moyen fondamental pour améliorer l’éducation des populations touchées par les crises.
Elle permet de financer les agences intergouvernementales et les organisations de la société civile opérationnelles sur le terrain dès le premier jour d’une crise, et notamment d’organiser des activités éducatives, former des enseignant.e.s, distribuer du matériel d’enseignement et d’apprentissage adapté, construire des abris et lieux d’éducation temporaires et reconstruire des écoles.
Mais l’aide humanitaire est indissociable du financement du développement qui, quant à lui, permet la stabilisation et la sortie de crise, le développement des capacités des systèmes éducatifs, la consolidation de la formation des enseignants et le renforcement de la société civile.
En 2021, la France a alloué 76 millions de dollars au Sahel, dont un quart à l’éducation de base.
Un retrait de l’aide publique au développement au Sahel – même dans l’hypothèse d’un maintien de l’aide humanitaire – aurait des conséquences dramatiques sur les populations, et constituerait un recul flagrant vis-à-vis des engagements nationaux et internationaux de la France en matière d’éducation.
La Coalition Éducation rappelle l’inconditionnalité du droit à l’éducation et souligne que l’éducation constitue, au même titre que la santé, l’eau, l’assainissement ou la protection essentielle, un service essentiel de base.
L’instrumentalisation politique, toute suspension, tout arrêt de l’aide contribuent à mettre en péril un droit humain déjà fragilisé par de multiples crises, en contradiction avec la politique française menée jusqu’à présent vis-à-vis du Sahel et des PMA, et peuvent mettre en péril le présent et l’avenir de générations entières, avec des conséquences sur leurs familles, sur la société et l’économie au sens plus large.