« Il y a une partie des Français qui se disent : je ne reconnais plus le pays dans lequel j’ai grandi. Et ça les amène parfois à voter pour le Front national ou à souhaiter la politique que le Front national propose. Et puis il y en a d’autres qui se disent : je suis français mais on ne me reconnait pas comme tel. Alors qu’est-ce que cela signifie ? Cela signifie qu’on est dans la méconnaissance et le malentendu. La méconnaissance, c’est la méconnaissance de notre histoire qui n’est pas qu’une histoire de la métropole. C’est une histoire de l’Outre Méditerranée, de l’Outre-mer. Nous avons une histoire mondiale qui a fait que la France est aujourd’hui diverse et qu’elle a des liens avec le monde comme jamais aucun autre pays d’Europe n’en a eu. Et puis, il y a un malentendu, c’est que de par cette diversité, parfois, certains croient que les valeurs de la République sont en danger, et notamment l’un des principaux piliers de la République qu’est la laïcité. Même le président de la République disait : « En 1905 la laïcité ne s’appliquait pas à l’Islam ». Il ne connaissait pas son histoire justement. La loi de 1905 est faite pour tout le monde et c’est ce qu’on ne comprend pas.
Sur quoi est basée la loi de 1905 ? Sur le principe fondamental de la liberté individuelle de conscience. Chacun a le droit de croire ou de ne pas croire, à égalité des deux options, la croyance ou la non croyance. Pour garantir cette liberté de conscience, la loi de 1905 a même prévu que si vous faites pression sur quelqu’un, votre voisin, votre cousin, votre employé, pour lui faire exercer un culte ou pour l’en empêcher, vous risquez une peine de prison, en tout cas une amende. Mais elle prévoit bien plus que ça : elle prévoit différents espaces pour éviter qu’une religion vienne à dominer l’Etat ou que l’Etat soit dominé par l’anti-religion, l’Etat est neutre, l’Etat ne prend pas position sur l’existence de Dieu. Pour faire respecter ceux qui croient, la loi de 1905 prévoit des lieux de culte où s’applique la loi de chaque culte. Et puis vous avez un troisième espace qui est chez vous. Chez vous, si vous voulez que les gens mettent un chapeau en arrivant, enlèvent leurs chaussures, mettent un chandail, vous faites ce que vous voulez. C’est votre loi personnelle, de votre lieu. Alors il reste le reste et là, on va réfléchir ensemble en tant que citoyens : qu’est-ce qu’on fait du reste de l’espace ? Par exemple et c’est pareil aux Etats Unis, là où il y a des enfants mineurs, ils ne peuvent pas aller devant la justice si on fait pression sur eux. Il faut les protéger contre toute pression, plus que les adultes qui peuvent résister en parlant, en protestant, en allant voir un avocat. Donc on prévoit la neutralité de l’école, c’est prévu par la laïcité. Et puis la loi de 2004 a prévu l’interdiction des signes ostensibles parce que certains signes pouvaient être utilisés pour faire pression sur des jeunes filles qui ne voulaient pas porter un signe religieux. Ceux qui pensent que la laïcité, c’est le combat contre la religion, ils n’interprètent pas bien. La laïcité, c’est d’abord du droit.
Une fois qu’on a compris que la laïcité c’est la liberté de conscience, comme on a chacun notre conscience qui n’est pas pareille que celle de son voisin, de son cousin, de sa petite sœur ou de son grand-frère, il faut organiser le vivre-ensemble. Le vivre-ensemble découle du respect de la liberté de conscience de chacun. C’est parce qu’on demande pour soi le respect, qu’on le donne aussi aux autres et que du coup, il faut organiser à la fois le commun et le différent. Je vous donne un exemple du commun : en France, on peut faire un mariage religieux, mais d’abord on se marie tous à la mairie. C’est la République, c’est le fond commun. Après chacun fait ce qu’il veut. Après le maire va lire les quatre articles du code civil relatifs au mariage. Dans la salle de la mairie, il va y avoir des gens très différents selon les mariages. Et après chacun va faire ce qu’il veut : s’il veut faire une cérémonie religieuse ou pas. Mais il y a le commun qui nous rassemble et ensuite le divers. La République c’est cette capacité à construire le commun dans le respect de la diversité. Toutes ces incompréhensions, qui nous paraissent absurdes, c’est ce qui a fait que Bibliothèques Sans Frontière dont je suis le président, a décidé après les attentats contre Charlie Hebdo de faire dix vidéos très claires pour les profs, pour les élèves pour les parents sur la Laïcité : questions-reponses-laïcite.fr »
Pour découvrir les vidéos sur la laïcité de Bibliothèques sans frontières : questions-reponses-laïcite.fr