C’est une affiche de la FCPE, membre de Solidarité Laïque, qui a relancé le débat autour des mères voilées accompagnant les sorties scolaires. Cette énième polémique rappelle l’importance de lutter contre toutes les tentatives de dévoiement ou d’instrumentalisation d’un principe de liberté.
Retrouvez le #RDVdelaLaïcité avec Jean-Louis Bianco, président de l’Observatoire de la laïcité :
Extrait :
» (…) C’est vrai qu’il y a une tendance à voir… Mais méfions-nous dans le choix des mots qui peuvent être blessants. Est-ce que c’est un “laïcisme”, est-ce que c’est une vision intégriste de la laïcité, en tout cas de lui faire dire ce qu’elle ne dit pas, et de lui faire dire ce qui n’est pas dans la loi mais ce que certains voudraient qu’il y soit. Par exemple qu’il n’est pas permis à des mamans accompagnatrices d’accompagner les sorties scolaires avec un foulard. Entre parenthèses, il y a des tas de villes où il n’y aurait plus de sorties scolaires si on faisait ça. Et en plus le phénomène d’intégration dû au fait que des mamans d’un milieu défavorisé et si j’ose dire en plus de la culture qui n’est pas la culture dominante mais qui est la culture musulmane, s’intéressent à l’école, c’est une très bonne nouvelle. Et vous imaginez ce que ça ferait chez les enfants si leur maman ne pouvait plus accompagner les sorties scolaires parce qu’elle a un foulard ? Ça, se sont des arguments d’ordre politique. J’ai donné des arguments d’ordre juridique dans une précédente réponse. Donc, c’est vrai qu’il y a une tendance à un extrémisme, mais surtout à une police de la pensée, en disant, moi, ce que je dis sur la laïcité, c’est bien. Ce que disent les gens qui ne pensent pas comme moi, c’est mal.” C’est une forme de débat public insupportable qui s’apparente à des procédés qu’on a connus dans certains pays de l’Europe de l’Est à d’autres époques. «
Que dit la loi ?
La laïcité, au cœur du système éducatif français, impose une neutralité des agents exerçant des missions de service public et ce, depuis la loi de 1905 sur la séparation de l’Eglise et de l’Etat. La loi de 2004 interdisant le port ostensible de signes religieux à l’école ne s’applique pas aux parents accompagnant les sorties scolaires.
Comme le rappelle le ministère de l’éducation nationale dans son vademecum de la laïcité (p.70) :
“ Les parents d’élèves peuvent, lorsqu’ils participent à l’encadrement d’une classe en sortie scolaire, porter un signe ou une tenue par lequel ils manifestent une appartenance religieuse, sauf si leur comportement ou leur discours traduisent une volonté de propagande ou de prosélytisme. “
Les parents d’élèves sont-ils assimilés à des agents du service public ?
Retrouvez à ce sujet cette fiche pratique publiée par l’Observatoire de la laïcité :
La circulaire Chatel de 2012 visant à étendre l’exigence de neutralité aux accompagnateurs, a été désavouée par le Conseil d’Etat en décembre 2013, qui a précisé que les mères accompagnatrices sont à considérer comme des « usagers » du service public non soumises aux exigences de neutralité religieuse qui s’impose aux agents de l’Etat et assimilés.
Refuser une vision excluante d’un principe de liberté
La polémique autour de cette affiche souligne de nouveau une vision excluante de la laïcité alors qu’il s’agit d’un principe de liberté. Comme le précise Jean-Louis Bianco lors du Rendez-vous de la laïcité “ La laïcité permet la liberté de conscience, la liberté de croire ou de ne pas croire, la liberté de changer de religion et la liberté de pratiquer son culte, quelle que soit sa conviction et quel que soit son culte. La limite, c’est l’ordre public, ne pas troubler le fonctionnement collectif, la liberté d’autrui, ne pas faire pression sur autrui, ne pas porter atteinte à sa liberté. “
Faisant suite à cette polémique et l’intervention du ministre de l’éducation nationale, la Ligue des droits de l’Homme, membre de Solidarité Laïque a publié un communiqué pour rappeler le droit et refuser cette laïcité d’exclusion. Elle y réaffirme l’importance d’ “offrir une juste place à tous les parents dans la vie scolaire, sans discrimination. Attachée à la loi de 1905, (…) la LDH défend inlassablement le principe selon lequel la liberté est la règle et sa limitation l’exception, et s’opposera à toute tentation d’étendre l’exigence de neutralité de l’Etat à la société tout entière. “