Le travail joue-t-il un rôle dans les rapports sociaux entre hommes et femmes ?
Le travail joue un rôle central dans l’évolution des rapports sociaux de sexe, ainsi que dans le processus d’émancipation des femmes. Quand on parle du travail des femmes, on parle en réalité de la place qu’elles occupent dans la société : c’est le travail qui donne aux femmes une identité sociale. Le fait de déclarer une activité rémunérée, de distinguer la fonction sociale d’avoir un emploi des autres fonctions plus domestiques ou strictement familiales, c’est s’affirmer comme membre d’une société économique. Par le travail, les femmes acquièrent également une autonomie économique. La salarisation, de ce point de vue, est un pas de plus vers l’indépendance : cela signifie un statut d’emploi régulé et, par ailleurs, cela opère une déconnexion entre le statut professionnel et le statut familial. Les femmes salariées ne sont plus des « femmes de », leur travail devient visible. Le travail est un fil rouge pour comprendre la place des femmes dans la société.
Cette idée vaut-elle partout dans le monde ?
Les réalités sont très différentes selon les pays du monde mais il y a des constantes comme la division sexuée du travail, la ségrégation des emplois, les inégalités salariales, l’assignation à certaines tâches… Le travail domestique reste ainsi partout un domaine féminin réservé, avec la caractéristique d’être invisible, inestimable et interminable. Quant à la répartition des emplois entre féminin et masculin, elle n’est pas toujours la même. En France, le secteur du bâtiment est quasi-exclusivement masculin, alors qu’il est mixte en Russie. En Afrique subsaharienne, ce sont les femmes qui assument tout le travail agricole, sans que cela ne soit ni reconnu ni rémunéré.
Quels sont les facteurs de développement de l’emploi des femmes ?
Ce sont l’instruction et le salariat qui déplacent les frontières de l’inégalité. En France, c’est à partir des années 1970 que les femmes sont devenues plus diplômées que les hommes. En même temps que le niveau d’instruction augmentait, le monde du travail se féminisait. Aujourd’hui, les femmes représentent 48 % de la population active. Mais si sur le plan arithmétique, la parité existe, les inégalités persistent : le sous-emploi et le travail à temps partiel restent, pour l’essentiel, des affaires de femmes : plus de 80 % des personnes travaillant à temps partiel sont des femmes et 30 % d’entre celles qui avaient un emploi en 2010 (contre 7 % des hommes) travaillaient à temps partiel, une proportion qui a à peine frémi en 15 ans. Il existe donc toujours un rapport sexué au temps : pour les hommes un temps salarié, libre des contraintes domestiques et pour les femmes une continuité, un mélange des temporalités.